Article N° 8230
Gonorhée - Résistance aux ATB
Gonorrhée résistante aux médicaments : L’OMS tire la sonnette d’alarme
Abderrahim Derraji - 24 novembre 2025 12:12Les dernières données publiées par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) révèlent une progression inquiétante de la résistance des gonocoques aux traitements antibiotiques. Issues du Programme élargi de surveillance de la résistance des gonocoques aux antimicrobiens (EGASP), ces informations montrent que cette infection sexuellement transmissible devient de plus en plus difficile à traiter, compromettant les avancées en matière de santé sexuelle mondiale. Le rapport insiste sur l’urgence de renforcer la surveillance, d’améliorer les capacités diagnostiques et de garantir un accès équitable aux nouveaux traitements.
L’EGASP, lancé en 2015, collecte des données cliniques et de laboratoire à travers un réseau mondial de sites sentinelles afin de suivre l’évolution des résistances et guider les recommandations thérapeutiques. Selon la Dre Tereza Kasaeva, directrice du département VIH, tuberculose, hépatite et IST de l’OMS, il est impératif que les pays intègrent la surveillance de la gonorrhée résistante dans leurs programmes nationaux.
Entre 2022 et 2024, la situation s’est nettement aggravée. La résistance à la ceftriaxone, traitement de référence, est passée de 0,8 % à 5 %, tandis que celle au cefixime a atteint 11% contre 1,7 % auparavant. La résistance à l’azithromycine reste stable à 4 %, mais celle à la ciprofloxacine atteint désormais un niveau alarmant de 95 %. Le Cambodge et le Viet Nam enregistrent les taux les plus élevés de résistance à cette fluoroquinolone.
En 2024, douze pays ont contribué aux données du programme EGASP, une progression notable comparée aux quatre pays rapporteurs en 2022, reflétant une volonté accrue de suivre et combattre la résistance. Les pays participants ont notifié 3 615 cas de gonorrhée. Plus de la moitié des cas symptomatiques chez les hommes sont issus de la région OMS du Pacifique occidental, principalement des Philippines, du Viet Nam, du Cambodge et de l’Indonésie. La Région africaine représente 28 % des cas, suivie par l’Asie du Sud-Est, la Méditerranée orientale et les Amériques.
Le profil des patients montre un âge médian de 27 ans, avec une forte proportion d’hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (20 %) et de personnes ayant eu plusieurs partenaires récemment (42 %). Près d’un patient sur dix avait utilisé des antibiotiques récemment, et 19 % avaient voyagé.
L’OMS souligne également les progrès réalisés : près de 3000 échantillons ont été séquencés en 2024, et des études sur de nouveaux antibiotiques comme la zoliflodacine et la gépotidacine sont en cours. De nouveaux pays, comme le Brésil, la Côte d’Ivoire et le Qatar, ont rejoint le programme.
Malgré ces avancées, l’OMS déplore un financement insuffisant, des données lacunaires, notamment chez les femmes, et un besoin urgent de renforcer les systèmes de surveillance nationaux. Elle appelle à investir davantage pour prévenir une crise mondiale de résistance aux traitements de la gonorrhée.
Source : OMS
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